» Il venait de passer l’après midi sur la plage. À laisser ses pas se faire guider par l’attraction des matières, des roches, des algues, des dégradés de verts, de rouges et de bruns, par les changements du ciel, les reflets sur la mer, par les étendues de sable dénudées par la marée. Et toujours comme musique le vent. Et cette phrase pour curieuse compagnie : Heureusement le temps ne donne jamais raison à l’injustice*. À nouveau il avait fait l’expérience de l’absolue clarté. Il appelait ça lumière blanche. Une dissolution dans le présent. Le mental s’était tu. Apaisé. À nouveau il avait fait l’expérience d’une simple présence au monde. Relié. Aimant. Immense. Un état de paix et de félicité. La première fois qu’il avait vécu ça il s’en souvenait parfaitement. A douze ans, au pied d’une cascade perdue au fin fond du Québec, s’approchant du bassin en traversant la bruine il avait senti cette force. Et il avait pris peur. Vraiment. Au pied de la cascade il avait brusquement reculé. C’était alors trop grand pour lui. Pendant longtemps ça avait été trop grand pour lui. À vingt ans il fardait la simplicité de ces instants suspendus sous la grandiloquence de quelques mots de Dieu. De bavardages métaphysiques. Maintenant il savait que c’était en fait bien plus immédiat. Bien plus accessible. Bien plus modeste. C’était quelque chose qu’il avait aussi pu goûter en usant de certaines drogues. Et à chaque fois tout devenait clair. Si clair. Aussi brillant et vivant que la texture d’un cours d’eau en montagne… » la suite ici…

Extrait de Maintien du désordre – Ludovic Pouzerate. Texte paru dans la revue Théâtre/Public N°224 « Présences du pouvoir », dossier coordonné par Olivier Neveux.


Actuellement en écriture :

Notre force, une commande de la compagnie Alaska / Bryan Polach – Karine Sahler, création à la Maison de la culture de Bourges Scène Nationale, automne 2024. Bourse de découverte du Centre National du Livre.

SIMONE, solo de et par Ludovic Pouzerate. Création 2025.